LES RUMEURS

Il se murmure que l'Eglise, l'urgence résolue, serait prête à assister les seigneurs restaurant la souveraineté sur Gallica afin d'éviter toute résurgence hétérodoxe.

On raconte sur les terres du Nord qu'on ne comprend pas pourquoi quand Merelde est pris d'une envie soudaine en Dramen il s'en va faire ses besoins en Goréhandal ?

Et de champs de batailles en cimetières, de clochers en abbayes, du choeur des cathédrales aux presbytères de champagne la comptine des terres du Nord a gagné les sables d'Al Razzim et les jungles de Dorasterre avant de s'embarquer pour les îles.

Non ! Non !
Non ! Non !
Bofanice n'est pas Mooooort
Non ! Non !
Non ! Non !
Bofanice n'est pas Mooooort
Car il bande encore
Car il bande encore
... ses muscles !

L’Hérésie de Bofanice le Cruel

Que tous l’entendent et que nul ne l’oublie : Bofanice le Cruel n’est pas un seigneur, mais un suppôt des ténèbres ! Ce misérable ne combat pas avec l’acier et la bravoure, mais avec la sorcellerie et les sciences impies ! Il a pactisé avec les forces occultes, souillant sa chair et son âme pour asseoir son pouvoir.

On l’a vu, sur les champs de bataille, invoquer des ombres qui n’appartiennent pas à ce monde. Les morts se lèvent à son commandement, les flammes dansent sans feu sous sa main, et la terre elle-même tremble sous ses pas. Ses ennemis ne tombent pas seulement sous l’épée, mais frappés par des malédictions qui les consument de l’intérieur. Là où il passe, les rivières deviennent cendres, le bétail meurt sans raison et les enfants naissent sans âme !

Mais que fait l’Église ? Que fait le Cardinal Goupelin ? Est-ce ainsi que nous laissons les démons se repaître du royaume des hommes ? Non ! Il faut agir ! Que l’hérétique soit traqué, jugé et livré aux flammes ! Que Goupelin prouve que la Sainte Foi n’a pas tremblé devant le mal !

Si Bofanice n’est pas brûlé, alors c’est Dieu lui-même que nous abandonnons.

« N'avions pas ben compris le raisonnement » s'exclame Gros Pierre rentrant des champs, « le protecteur du protégé qu'étions sous l'aile du roi doit par extension protéger le roi ??? 
C'est comme qui dirions sibyllin cette jactance !»

« Ben en tous cas on n'voudrions point être le protégé du protecteur qui risque de se prendre des coups par ricochet... Surtout quand on savions que le protecteur est à la ramasse et arrive après la bataille. »

On raconte que depuis la nuit des temps, les choses n'ont jamais changé. Les perdants pleurnichent pendant que les vainqueurs festoient.

Il est également drôle de constater que les rôles sont souvent joué par les memes acteurs.

Une comptine née en Goréhandal se répand sur les terres du Nord :
Non ! Non !
Non ! Non !
Le Marquis n'est pas Mooooort
Non ! Non !
Non ! Non !
Le Marquis n'est pas Mooooort
Car il bande encore
Car il bande encore
... son arc !

Avec le bon sens qui la caractérise, la gent des campagne qui a les pieds sur terre assure que lorsqu'on a la chance de revenir d'entre les morts encore jeune et en bonne santé mais nu comme un ver, il vaut mieux profiter de sa chance, remettre ses vengeances à plus tard et ne pas demander son reste.
En revanche si on revient de chez Hadès tout moisi et ratatiné set qu'on a la chance de pouvoir recruter une armée pour se venger avant de retourner manger les racines de pissenlit, alors autant se faire un dernier plaisir

Il se murmure, dans les halles et les chaumières, que tous les morts ne trouvent pas le repos. Certains, arrachés trop tôt à la vie, reviennent hanter les vivants, guidés par un dernier serment ou une rancune inassouvie.

On raconte qu’au cœur des batailles les plus sanglantes, quand l’acier perce la chair et que les âmes quittent leur enveloppe dans un râle, certains guerriers refusent d’abandonner leur vengeance au néant. On dit que leurs ombres se relèvent dans la nuit, que leurs pas résonnent sur les pavés mouillés comme au jour de leur trépas. Ils cherchent ceux qui les ont trahis, ceux qui leur ont volé la vie… et quand ils les trouvent, aucun mur ni aucune prière ne peut les protéger de leur courroux.

Mais il est une autre rumeur, plus sombre encore. Tous les morts ne reviennent pas pour se venger. Certains reviennent pour fuir. Des lâches, tombés dans la honte et la peur, qui refusent d’affronter le jugement du royaume des ombres. Ils errent sous la lune, tremblants et fuyants, se cachant dans les bois, dans les ruines, évitant les regards comme des chiens battus. Leurs visages sont pâles comme la cendre, leurs yeux creux trahissent l’angoisse d’un châtiment éternel.

Ainsi, les anciens le disent et les bardes le chantent : « Qu’un homme meure en paix, ou qu’il revienne tourmenter ce monde, c’est la mort elle-même qui choisit à qui offrir le repos… et à qui le refuser. »

Il se dirait que le message de la reine Tanaka menaçant de le poursuivre pendant plusieurs générations s'il attaquait Cassius mais de le couvrir d'or s'il se ralliait, n'a rien à voir avec son expédition punitive.
Les arguments de Sire Merelde sont d'une logique sans faille et ne souffrent aucune discussion. Le général n'a peur de personne et surtout pas d'une petite reine perdue dans les jungles de Dorasterre.
Il n'a cure des esprits mesquins qui pensent le contraire.